Le mangeur de livres
Deuxième roman lu pour le Prix littéraire La Passerelle organisé par notre réseau de lecture publique Valence Romans agglo et premier roman de Stéphane Malandrin, paru au Seuil, que j'ai, moi aussi, littéralement dévoré!
Nous sommes à Lisbonne à la fin du XVe siècle. Adar et Faustino sont deux garnements, copains à la vie à la mort et pour cause! Tous les deux sont nés le même jour de janvier 1477. Mais si la mère d'Adar, juive espagnole convertie, décède des suites de l'accouchement, celle de Faustino, veuve dont il est le dernier des huit enfants, reste, elle, bien vivante, et accueille de manière plus ou moins autorisée le petit Adar qu'elle élève comme son fils malgré la grande pauvreté de la famille.
Utilisant mille ruses pour chaparder ici ou là, désobéir et faire les 400 coups, les deux amis, quasi jumeaux, se font surprendre un jour par le curé du quartier qui, pour leur donner une leçon et les inviter à réfléchir sur leurs actes, les enferme dans la crypte de l'église avec pour seule compagnie, un livre qu'il leur demande de lui lire. Mais les deux compères ne savent pas lire. Les heures, puis les jours commencent à passer et, ne pouvant plus résister à la faim qui le tenaille, Adar se décide à manger le livre, un codex en latin, surpris par sa texture, un velin en peau de veau mort-né.
Mais voilà! Ce codex est porteur d'une malédiction. Et Adar ne peut plus se nourrir à présent que de ce cuir de veau qui ne se trouve que dans les bibliothèques des églises. Commence alors une quête incessante pour rassasier le jeune garçon qui n'en a jamais assez. Une quête et une course poursuite pour les deux complices car, bien sûr, Faustino ne le lâche pas et tous ces ouvrages qui disparaissent ainsi ont tôt fait d'alerter les prêtres et bientôt toute la population qui le condamne.
J'ai lu ce roman d'une traite tellement il est agréable à lire, plaisant, écrit en courts chapitres successifs qui s'enchaînent les uns aux autres accélérant ainsi le rythme de ce récit vif et plein d'humour porté par la voix d'Adar. On y ressent le danger que peuvent créer ceux qui ont la connaissance, qui se sentent ainsi supérieurs aux autres, les ignorants, ceux qui ne savent pas ou rien et qui peuvent alors les manipuler en toute bonne foi en pensant être dans leur droit.
A travers cette histoire un peu invraisemblable, qu'on a envie de lire un peu comme un conte, c'est tout une vérité un peu effrayante qui se laisse deviner. Une vérité qui, malgré le passage du temps, est toujours d'actualité et c'est bien ce qui inquiète finalement.