Les lions de Sicile
Lorsque nous sommes allés à Turin en mai dernier à l'occasion du Salon international du livre, quasiment toutes les librairies présentaient ce roman de Stefania Auci comme le best-seller du moment. La couverture m'a bien plu et, n'écoutant que mon coeur, je me suis laissée aller à un achat impulsif que, vu la taille du livre (437 pages quand même) j'ai presque aussitôt regretté. Mais... trop tard!
Alors j'ai fait comme souvent en pareille situation, sitôt rentrée, j'ai déposé ce livre sur une étagère et l'y ai laissé reposer pendant plusieurs semaines, voire deux bons mois. Et puis, l'été s'installant, une charge de travail allégée, un peu plus de temps pour lire et l'attirance pour sa couverture et son résumé en 4e toujours intacts, j'en ai commencé la lecture en fin de semaine dernière, pour ne plus le lâcher du week-end jusqu'à hier soir.
Il faut dire, et c'est tout à l'honneur de Stefania Auci, que ce roman passionnant de la première à la dernière page est vraiment très agréable à lire. L'écriture est fluide, coule comme une eau limpide sans toutefois nous épargner quelques scènes bien senties ni nous entraîner dans des situations parfois bien inconfortables. L'émotion est au rendez-vous de cette véritable saga familiale inspirée d'une histoire vraie et, comme toujours dans ces cas-là, on rit, on pleure, on vibre, on s'aime, on se trahit, on vit (on meurt aussi) au rythme des protagonistes et on oublie tout le reste.
Ce roman est paru chez l'éditeur italien Casa editrice Nord début 2019 et j'ai ouï dire que de nombreux pays en avaient demandé la traduction dont la France. Alors, patience, vous l'aurez bientôt entre les mains!
Alors tout ceci est bien beau et très intéressant, êtes-vous en train de penser mais ce roman, de quoi parle-t-il?
Tout commence lors du tremblement de terre qui secoue la région de Bagnara Calabria en cette fin de 18e siècle et laisse les frères Paolo et Ignazio Florio sains et saufs certes mais sans plus aucune ressource également. Leur salut, ils le trouvent dans cette petite propriété terrienne familiale dont ils ne se sont jamais occupé jusqu'à présent parce qu'elle se trouve en Sicile à proximité de Palerme. Pour eux qui ont toujours vécu sur le continent, aller sur l'île est un déchirement. Mais que vaut-il mieux ? Être pauvre sur une terre aimée ou tenter l'aventure ?
Sur place, les deux frères ne tardent pas à déchanter. Car, contrairement à ce qu'ils pensaient, les Palermitains jouissent d'une certaine aisance, et même d'opulence pour certains, et n'hésitent pas à les prendre de haut. Ce qui a pour conséquence directe d'inciter Paolo et Ignazio à s'imposer et à réussir dans cette nouvelle vie en ouvrant un magasin de vente d'épices.
C'est avec Vincenzo, fils de Paolo, cependant que l'entreprise familiale va se développer et connaître l'avènement de la fameuse Marsala Florio à travers la Sicile, l'Italie puis hors des frontières. Mais bien sûr tout ceci ne se fera pas tout seul. Car les femmes vont aussi avoir leur mot à dire dans cette ascension sociale, qu'elles soient épouses, mères, filles, belles-filles ou maîtresses. Les coups bas, les trahisons, les déclarations d'amour ne manquent pas. De même que les craintes, les peurs, les drames, les pertes (humaines ou financières) vécues tout au long de ces années, qui vont de 1799 jusqu'à l'annexion de Rome au Royaume d'Italie, au rythme des soubresauts de l'Histoire italienne.
En plus d'être vraiment passionnante, cette saga familiale des Florio s'appuie sur une documentation extrêmement riche et détaillée qui lui confère une qualité supplémentaire et qui, pour moi, constitue une grande découverte sur cette époque de la construction de l'Italie.
J'ai toutefois un seul petit regret : ne pas pouvoir compter cette saga pour le challenge Pavé de l'été chez Brize puisqu'il y manque quelques 170 pages. Mais cela n'enlève absolument rien au plaisir intense ressenti à cette lecture.