L'amour harcelant

Publié le par Martine

L'amour harcelant

Journée spéciale "Elena Ferrante" aujourd'hui pour le mois italien d'Eimelle.

Je ne reviendrai pas sur la polémique qui vient d'agiter les médias culturolittéraires quant à la nécessité de connaître à tout prix l'identité de l'auteur alors que celle-ci souhaite conserver son anonymat.

Je ne vous parlerai pas non plus de son bouleversant "L'amie prodigieuse" dont je vais lire la suite "Le nouveau nom" tout bientôt.

Non, aujourd'hui, je vous parlerai du premier roman d'Elena Ferrante "L'amour harcelant" paru en Italie en 1992 sous le titre "L'amore molesto" et en 1995 dans la collection "Du monde entier" de Gallimard pour sa traduction française de Jean-Noël Schifano.

Alors qu'elle a prévenu sa fille Delia de sa venue chez elle à Rome pour fêter son anniversaire, le corps d'Amalia est retrouvé noyé, uniquement vêtu d'un soutien-gorge de très belle qualité, acheté dans une luxueuse boutique napolitaine. Comment cela a-t-il pu arriver? Comment Amalia, qui a toujours vécu petitement, cousant et reprisant ses vêtements et ceux de ses trois filles, tirant également un maigre revenu de ses talents de couturière mis au service de la population féminine de Naples, comment a-t-elle pu se payer une lingerie aussi somptueuse? Egalement pourquoi n'a-t-elle sur elle que ce soutien-gorge? Où sont passés ses vêtements? Pourquoi a-t-elle téléphoné à Delia pour lui dire qu'elle arrivait, puis qu'elle ne venait plus et finalement annoncer son arrivée sur un mystérieux ton d'affolement? Qui a-t-elle bien pu rencontrer qui aurait ainsi attenté à sa vie?

Toutes ces questions, et bien d'autres, tournent dans la tête de Delia, s'entrechoquent, se mêlent et se démêlent sans qu'aucune réponse plausible ne la satisfasse. Et d'autant plus que l'autopsie conclut à une noyade. Delia se retrouve alors seule pour essayer de comprendre. Ses deux jeunes soeurs sont reparties sitôt la cérémonie des funérailles achevée. Son père, séparé d'Amalia depuis de nombreuses années, n'a pas daigné y assister. Son oncle, frère d'Amalia, en veut toujours à celle-ci d'avoir terni l'image familiale en fuyant, avec ses filles, un mari violent qui la frappait.

Seule face à elle-même, Delia engage une véritable quête pour comprendre qui était sa mère, qui était cet homme que tous ont toujours considéré comme son amant et, surtout, pour enfin se (re)trouver elle-même. 

Cette lecture m'a singulièrement émue. J'ai été de suite en totale empathie avec cette femme, Delia, avec sa mère, Amalia, avec ce lien ténu, tenace qui les a à la fois réunies et éloignées l'une de l'autre. Ce roman, c'est celui de cette quête et c'est aussi celui du deuil, de la fin de quelque chose pour laisser la place à un nouveau départ, du besoin de comprendre, d'accepter pour pouvoir tourner la page et poursuivre sa route. 

C'est aussi une magnifique description de Naples dans les années 1960-1970. La misère qui y règne, les astuces plus ou moins honnêtes pour vivre, ou plutôt pour survivre, le besoin de reconnaissance, de se sentir vivant malgré ce poids sur les épaules, dans la poitrine, ce poids qui empêche de respirer en grand.

Je terminerai cette présentation avec cet extrait à la page 169, presque à la fin du roman. Une petite phrase de rien du tout et qui dit tout "L'enfance est une fabrique de leurres qui durent à l'imparfait." C'est beau, non?...

L'amour harcelant
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P
Aujourd'hui, j'ai eu "L'amitié prodigieuse" en main ; je me souvenais que tu en avais fait la critique. Irrésolue, je l'ai reposé à sa place dans le rayon... <br /> Ma PAL diminue bien en ce moment et rien ne m'empêche de faire connaissance plus tard avec l'auteur ;-)<br /> Gros bisous, chère Martine, et bonne fin de soirée.
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M
La prochaine fois, prends-le! Tu ne le regretteras pas!!! crois-en mon expérience de lectrice!!! :-)<br /> Gros bisous, ma chère Denise! Et très belle journée à toi, à vous
E
décidément, que du bon chez elle!
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M
Je trouve aussi :-)