Définitif
Tout en me passionnant pour mon premier pavé de l'été, j'ai lu également pas mal de nouvelles, en recueils collectifs ou individuels à l'image de celui que Fabienne Botto vient de publier chez L'atelier de Fabeli "Une vie neuve", titre également de la première de ces 10 nouvelles.
Si j'apprécie beaucoup que des nouvelles me racontent une histoire, j'aime aussi tout autant lorsqu'elles mettent l'accent sur un moment-clé de nos existences, sur ces instants, souvent fatidiques, où l'on prend la mauvaise décision, où l'on réagit sans réfléchir en prenant conscience de nos actes seulement après, quand c'est trop tard, ces moments délicats, difficiles, tragiques parfois qui font que tout bascule et que nos vies prennent un nouveau départ, constituant ainsi, à leur insu, autant de premières fois dont on se serait bien passés.
Ces moments-là, c'est ce que Fabienne Botto s'applique à nous faire vivre et partager à travers ces nouvelles sensibles, fortes, puissantes, où chaque mot a son importance, est à sa juste place, bien choisi, pesé, estimé, comme dans un puzzle.
Je ne vous détaillerai pas chacune de ces dix nouvelles dont quelques-unes ont déjà été publiées dans le recueil numérique "Ici on aime" pour les éditions Emoticourt et que j'ai eu grand plaisir à relire.
Je me contenterai de vous parler de la troisième, celle qui m'a le plus touchée et parlé, dont la sensibilité se reçoit en pleine face, rien que par son style et sa construction : "Définitif".
Ce qui est définitif pour cette femme et mère de famille, c'est l'annonce qu'elle vient d'apprendre par téléphone du décès soudain, inattendu de l'homme qui partage sa vie, son mari sans doute, et père de ses enfants. Entre le moment où elle reçoit cet appel et l'arrivée des enfants au sortir de l'école, toute une palette d'émotions se bousculent en elle.
L'incrédulité tout d'abord, la compréhension quand les mots atteignent leur objectif et s'imposent, compréhension qui se heurte de suite à l'incompréhension "pourquoi?", les gestes du quotidien à se rappeler, à exécuter pour ne pas sombrer, les larmes qui débordent sans y avoir été invitées et qu'il faut essayer de cacher parce qu'il faut rester forte pour les enfants. Et justement comment le dire aux enfants? Comment leur annoncer? Comment être celle qui s'apprête à briser leur enfance et à les confronter à cette perte définitive?
Dans cette nouvelle, aucune phrase construite. Rien que des verbes à l'infinitif qui se suivent, se complètent, s'ajoutent, s'enchaînent les uns aux autres comme autant de coups portés au coeur. "Raccrocher le téléphone (...) Se lever. Vaciller (...) Rincer, couper les légumes. Ne pas penser (...) Pleurer. Respirer. Attendre. Ne plus l'attendre (...) Parler. Les entourer, les envelopper. Les protéger (...)"
C'est beau, terriblement beau. Et à lire, absolument.
Ce recueil est disponible directement auprès de l'auteure Fabienne Botto. N'hésitez pas à me demander ses coordonnées en commentaires. Merci.