Les neiges de Toula
L’introduction est aisée certes, et encore plus lorsqu’on apprend que l’auteur de cette épopée a lui aussi des origines russes et en particulier aristocratiques.
Bien sûr les trajectoires de Serguei et de Jean-Baptiste sont loin l’une de l’autre. Serguei vit sous le règne du tsar Alexandre II dans les années 1860 tandis que son auteur suit sa route en France entre terres dauphinoise et parisienne.
Pour Serguei, tout commence lorsqu’il tombe sous le charme de la jolie Tatiana. Mais celle-ci ne fait pas partie de la noblesse dominante et, pour ne pas perdre son amour tout neuf, le jeune homme se voit obligé d’abandonner le domaine familial et son statut d’héritier de l’armurerie paternelle pour fuir à Saint-Pétersbourg. Là il s’engage dans l’armée mais pas pour longtemps hélas ! Contraint de fuir à nouveau pour avoir provoqué son congénère et prince Mirnov en duel, il se fait enrôler dans les services secrets du tsar et doit infiltrer un dangereux groupe de terroristes. Tout se complique encore pour le vaillant Serguei lorsque son infiltration le met en contact avec la belle Olga Dementieva, redoutable terroriste révolutionnaire qui ne recule devant absolument rien. Tous les ingrédients se trouvent alors ici réunis pour permettre à Jean-Baptiste Bester de nous offrir un roman au souffle épique et héroïque de belle qualité littéraire et nous faire vivre une destinée hors du commun.
Jouant sur tous les fronts du récit, oscillant entre les souvenirs évoqués par un Serguei âgé faisant le point sur les évènements successifs qui ont jalonné sa vie, l’humour salvateur venant soudain alléger une situation trop grave voire dramatique, alternant les rythmes tantôt romancés, tantôt d’un réalisme effrayant, l’auteur nous livre ici un roman couvrant les années qui ont précédé la grande révolution russe de 1917. S’appuyant sur de solides recherches documentaires, ne faisant aucun cadeau sur les réalités d’un empire au plus fort de sa supériorité et qui s’obstine à ne pas voir la misère devant sa porte, ne nous faisant grâce d’aucune cruauté générée pour « la cause » révolutionnaire, Jean-Baptiste Bester se fait aussi un malin plaisir à nous mettre en présence de personnages hors du commun, dotés de caractères bien trempés, et qui évoluent dans des paysages qui n’ont de paradisiaques que leurs descriptions. Une grande et belle saga à dévorer très vite.