Laisser les cendres s'envoler
Parmi les 646 titres que compte la rentrée littéraire 2012, celui de Nathalie Rheims « Laisser les cendres s’envoler » paru aux éditions Léo Scheer ne lasse pas de nous émouvoir.
« J’ai perdu ma mère il y a dix ans. Ma mère est morte, je le sais. Mais, lorsque j’y pense, je ne ressens aucun chagrin, pas la moindre émotion. Tout reste plat comme une mer gelée, pas un seul petit frémissement à la surface de l’eau. Quand je pense à elle, il ne se passe rien. » C’est par ces quelques phrases impressionnantes, lourdes de sens et de mystère que Nathalie Rheims commence son récit autobiographique.
Enfant solitaire, petite fille grandissant entre un père absent et une mère qui va le devenir en l’abandonnant pour vivre un amour dominant, souffrant d’anorexie « par nécessaire besoin de ne pas être elle (ailes ?) », c’est une enfance et surtout une adolescence et de jeunes années gâchées que vit l’auteur.
Malgré la présence d’une famille, grands-parents, oncle, omnipuissante et imposante, rien ne peut faire accepter à la petite fille puis à la jeune femme qu’elle devient ce qu’elle est bien obligée de considérer comme un abandon, une « petite mort » maternelle précoce qui précèdera de quelques années seulement le véritable passage de la grande faucheuse, à un moment où pourtant la mère et la fille allaient peut-être se retrouver enfin… La vie (et en l’occurrence la mort) se montre parfois d’une cruauté intense.
Ce texte à la première personne, Nathalie Rheims nous l’offre comme une confidence, voire une confession. L’auteur s’y dévoile avec une pudeur farouche et néanmoins quasi impudique. Elle nous y expose ses sentiments les plus intimes et nous révèle des émotions fortes, puissantes dans une extrême sensibilité.
Nul besoin d’en connaître « tout un rayon » sur la psychologie humaine et, ici particulièrement, féminine, pour comprendre que ce texte s’est écrit comme un exutoire, la possibilité enfin saisie de se décharger d’un poids devenu bien trop lourd à supporter.
Pourtant aucun voyeurisme ne s’en mêle. Bien au contraire ! On entre en empathie avec l’auteur de ces lignes sans a priori, avec toute notre confiance et on n’est pas déçu ! L’échange confidentiel prend toute sa dimension et on écoute, on comprend, on partage… en toute humilité. Un texte sensible et rare d’une intense luminosité.