L'Odyssée d'une femme amoureuse
Contrairement à ce que le titre de ce roman de Bernard Simonay pourrait laisser penser, « L’Odyssée d’une femme amoureuse » paru aux Presses de la Cité ne nous conte pas une énième histoire d’amour ou bluette sentimentale mais s’inspire d’une histoire vraie pour nous parler d’Histoire et d’amour « interdit ». Interdit non par la morale ou la société bien pensante de l’époque mais par la politique nationaliste initiée par Hitler en Allemagne puis en Autriche dans le Grand Reich une fois qu’il aura réalisé l’Anschluss. Politique qui condamnait sans appel tout mariage entre un allemand de race pure, autrement appelé « aryen », et une personne de race inférieure ou pire de confession juive.
Cet amour interdit, c’est celui que va vivre Elyane, née dans une riche famille de Hambourg en 1912 et avec qui Bernard Simonay nous invite à faire connaissance de sa naissance jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale. Ainée d’une fratrie de cinq enfants dans une famille unie, Elyane connaît d’abord la perte douloureuse de sa jeune sœur de santé fragile avant de tomber amoureuse d’Eran Rozenberg, juif beau et hypocrite, qui n’aura de cesse de tromper sa jeune épouse avec tous les jupons qui passeront à sa portée (et il y en aura hélas !) et n’éprouvera aucune reconnaissance envers elle même lorsque celle-ci abandonnera tout, sa famille, ses amis, sa fortune, son pays, pour le sauver d’une mort certaine.
C’est d’ailleurs au cours du voyage en bateau qui conduira le couple en Argentine en 1938 qu’Elyane rencontrera Paul, celui qui sera réellement l’homme de sa vie. Mais décidera-t-elle finalement de divorcer pour refaire sa vie avec lui alors que son éducation si rigoureuse y est farouchement opposée ?
A travers cette histoire, certes romancée (mais l’auteur avait besoin de se l’approprier de cette façon pour mieux nous la conter), Bernard Simonay nous offre un roman palpitant où bien des explications nous sont apportées. La situation de l’Allemagne au sortir du premier conflit mondial, la dette de guerre et la période d’inflation qui a accompagné son versement favorisant d’autant la montée implacable du parti nazi, l’accession au pouvoir d’Hitler, sa volonté d’anéantir toute une population, la rafle du Vel d’Hiv’ et la découverte des camps français, tout ceci nous est expliqué avec force précisions et dans un style narratif des plus agréable.
Avec délicatesse et réalisme, l’auteur nous emporte à la suite d’Elyane et nous émeut sans nous entrainer jamais dans une quelconque sensiblerie outrancière. Ce destin, certainement commun à d’autres, nous le partageons avec notre cœur et notre intelligence en ne manquant pas d’essayer de répondre à cette question fondamentale : pourquoi la folie meurtrière d’un seul homme a-t-elle débouché sur un si terrible drame mondial ?