Passeurs d'ombre

Ce roman de Marie Kuhlmann paru aux Presses de la Cité dans la collection Terres de France, production Jeannine
Balland, nous fait retrouver avec grand plaisir les personnages déjà rencontrés dans « Le Puits Amélie » au début du siècle dernier et cette belle région d’Alsace chère au cœur de
l’auteur.
Avec ces « Passeurs d’ombre », nous entrons de plein fouet dans la Seconde Guerre mondiale et découvrons les actes de résistance de Blanche, Théo, Antoine et Anneliese, leurs enfants,
et tous ces hommes et femmes, enrôlés de force dans la Wehrmacht pour combattre contre la France, les « Malgré nous », ou entrés en clandestinité pour marquer leur opposition au régime
national-socialiste hitlérien.
Le roman débute en août 1939 alors que Lucien Mosmann, père de Blanche et ancien mineur, vit ses derniers jours. Quand la guerre éclate, les Mines de potasse alsaciennes passent sous contrôle
allemand et Blanche, qui s’occupait jusqu’alors des œuvres sociales des mines de la Cité Amélie, est contrainte de reprendre son poste d’assistante du responsable de la mine, lequel, bien sûr,
doit être un allemand « aryen » de bonne lignée. Aussi la surprise de la jeune femme n’en est que plus grande quand l’homme qu’elle a connu pendant la Dernière Guerre, celui qu’elle n’a
jamais cessé d’aimer, Kurt Friedrich, s’installe d’office dans sa maison. Désormais veuf, il ne partage aucunement les convictions d’une race supérieure imposées par Hitler. Il faudra pourtant un
malheureux accident à la mine pour que Blanche en soit convaincue et que les deux anciens amants retombent dans les bras l’un de l’autre. Malgré les commérages et l’imprudence vitale dans
laquelle cet amour les plonge, le couple, et en particulier Blanche, va créer le « réseau Amélie » et aider ainsi de nombreuses personnes, juives ou alsaciennes, à fuir clandestinement,
et par la Suisse, cette région française annexée à l’Allemagne.
D’une écriture puissante et sensible, l’auteur nous conte cette fiction, aux criants accents de vérité, avec un réalisme impressionnant et une grande délicatesse. Certes le danger est là,
omniprésent, qui nous fait craindre et vibrer en même temps que ces personnages. Mais l’espoir et la passion mise au service d’un patriotisme à toute épreuve en font un texte d’une justesse
exemplaire.