Téléréalité
Quand Ska Editeur numérique s'amuse à nous proposer du long (enfin, du long... relatif!), c'est aussi du lourd, et même du très lourd! J'en veux pour preuve cette longue nouvelle ou court roman (au choix) signé(e) Luis Alfredo, Téléréalité, deuxième saison de la série "Itinéraire d'un flic".
Ruminant sa solitude lors d'une longue soirée monotone, le commandant de police René-Charles de Villemur est brusquement interrompu dans ses sombres pensées pour se rendre dans les locaux de tournage d'une téléréalité où le corps, poignardé, d'une concurrente vient d'être retrouvé dans les toilettes. L'endroit ne manquant pas de caméras (et pour cause!), l'amateur mondain de cigares cubains pense boucler cette affaire très vite. Sauf que... la caméra installée dans les toilettes est purement fictive (tant mieux!) et celles qui longent le couloir y menant ont été désactivées!
Notre commandant de police est donc contraint de résoudre ce qui, très vite, s'assimile à un crime. Mais qui des participants, de la production, des techniciens ou encore des agents de sécurité peut avoir voulu supprimer ainsi cette malheureuse jeune femme qui, certes, ne faisait pas l'unanimité chez ses concurrents mais était "repêchée" chaque semaine par le public? Une enquête que de Villemur va devoir mener à huis-clos et rapidement, avant que les journalistes ne s'emparent de ce "scoop"!
Que vous dire de cette lecture si ce n'est qu'elle pointe du doigt le pire de notre société avec une authenticité confondante? Le milieu de la téléréalité (mais j'en étais déjà convaincue) se révèle ici encore plus cruel et abject que ce qu'on est en droit de soupçonner. Les images truquées, l'appât du gain, la course à l'audience, le vide colossal de l'existence des concurrents, tout ceci, on connaît. Mais, ici, c'est multiplié puissance 1000, Luis Alfredo n'hésitant pas à noircir le tableau à volonté tout en réussissant la prouesse de toujours rester crédible.
Peut-être tout simplement à cause de la personnalité atypique (mais au demeurant fort sympathique) de son personnage récurrent, le commandant de Villemur. Avec son air de ne pas y toucher, de se montrer conciliant avant d'abattre ses cartes, de pousser ses témoins dans leurs derniers retranchements en jouant à leur propre jeu, il ne lui faut pas longtemps pour faire la vérité sur cette bien triste histoire. Sans compter que ce commandant à particule n'est pas dépourvu du standing et des qualités? défauts? liés à sa naissance aristocratique. Et tout ceci ajoute aussi une pointe d'élégance, légère certes, mais suffisante pour contrebalancer la noirceur de cette sordide affaire.
Bien évidemment, je compte cette lecture pour le challenge Polar et thrillers chez Sharon. Elle y a toute sa place!