La piste de Campagna
Cela fait bien longtemps que je n'ai pas parlé ici de nouvelles noires et celle-ci signée Massimo Carlotto est particulièrement sombre. Et particulièrement réussie.
A Padoue, l'inspecteur Giulio Campagna gère ses enquêtes selon des méthodes pas toujours orthodoxes et parfois même à la limite de la légalité, toujours couvert par son supérieur direct qui préfère se baser sur les résultats, satisfaisants au demeurant, obtenus. Mais cette situation a ses limites. Et quand le commissaire divisionnaire Lopez le convoque, seul, dans son bureau, Campagna comprend que la roue a tourné.
Pour lutter contre la montée en puissance du trafic et de la consommation de cocaïne dans toutes les couches de la société, tous les policiers sont sur la brèche. Et de par sa connaissance du milieu, et parce qu'il a protégé à plusieurs reprises son ami d'enfance Pizzo, petit trafiquant et que celui-ci s'en est un peu trop vanté, l'inspecteur Campagna est le premier sollicité pour infiltrer seul, un réseau, à découvert et sans aucun soutien. C'est à ce prix seulement qu'il pourra regagner la confiance et l'estime du divisionnaire et de sa hiérarchie.
Mais c'est un prix bien lourd à payer car dès lors, il n'y a plus de limites à la montée de la violence et l'esprit de vengeance atteint son paroxysme quand la propre famille de l'inspecteur devient concernée...
Cette nouvelle fait partie d'un recueil collectif de trois "Cocaïna" (les deux autres sont signées Gianrico Carofiglio et Giancarlo De Cataldo, autres écrivains italiens réputés pour leur écriture très noire). Je ne pense pas les lire à la suite, besoin de "souffler" entre deux. Mais je suis curieuse de savoir comment ces deux écrivains abordent ce thème commun autour de la cocaïne. Cette première découverte me laisse abasourdie, m'a fortement impressionnée. Comme à son habitude, Carlotto n'hésite pas à sonder le plus intime, le plus profond, le plus sombre de l'âme humaine et nous entraîne vers des perspectives assez inimaginables mais que je sais exister cependant. Et c'est bien ce qui est le plus glaçant. L'histoire est menée tambour battant et ce rythme trépidant, comme un tour sur des montagnes russes, nous captive et nous empêche de poser le livre, ne serait-ce qu'un instant. Ce qui ajoute encore à la chute qui nous prend à contre-pied et signe la qualité indéniable de cette excellente nouvelle.
Précision pour celles et ceux qui voudraient lire ce recueil, il est paru dans sa traduction française aux éditions 12-21.
Je compte aussi cette lecture pour le mois du polar chez Sharon.