Pour le sourire de Lenny
Il est des romans qui nous attirent rien que par leur titre, leur couverture qui donnent envie qu'on les prenne en mains, qu'on les retourne pour lire la quatrième de couv' et qui font qu'immédiatement on les ouvre. Et l'attirance ressentie quelques instants plus tôt se confirme, laisse place à quelque chose de plus doux, de plus tendre, de plus affectueux presque. Le charme opère et cette nouvelle lecture nous emporte, nous emmène un plus loin, un peu plus au Sud, à Aigues-Mortes.
C'est dans cette ville du Roussillon à peine sortie de l'hiver 2003 qu'arrivent un jour Titi et Savate, deux traîne-misère qui vont là où leurs pas les portent. Sur place leur présence suscitent des réactions partagées. Il y a ceux qui se méfient d'eux (les plus nombreux) et les autres, Pâcome le saunier qui leur ouvre sa porte et les héberge, et Marcellin qui, malgré ou parce qu'il est retraité, fait tout ce qu'il peut pour leur dégoter un emploi.
Et puis il y a Lenny, garçonnet de 9 ans, qui met dans sa passion pour le skate toute la peine et le chagrin que lui inflige son père qui, pour une raison qu'on ignore, ne lui exprime que du dédain et de l'indifférence quand ce n'est pas plus. Très vite, une complicité teintée d'affection se crée entre Savate et Lenny, l'enfant trouvant dans cet homme les repères paternels qui lui manquent et l'homme... On ne sait pas trop. Peut-être la fougue, les défis que se lance l'enfant et le mettent en danger parfois. Des attitudes qui troublent Savate et ne sont pas sans réveiller certaines émotions, certains souvenirs bien enfouis en lui.
Mais un jour, c'est le défi de trop, l'accident. Et alors que la vie de Lenny repose entre les mains du personnel hospitalier, Savate ne peut plus se cacher derrière ce surnom. En particulier face à la mère de Lenny, Gaëlle. Parce qu'il arrive toujours dans la vie un moment où les secrets doivent être dévoilés. Même si ça fait mal.
Cette lecture a agi sur moi comme un pansement, une protection contre quelque chose de trop fort. Pour les plus jeunes, on parlerait de "doudou". Ce roman de Dany Rousson, paru aux Presses de la Cité dans la collection Terres de France, fait du bien au coeur, à l'âme, nous réconcilie avec la nature humaine, contre toutes les mauvaises choses, les méchancetés, que l'on peut s'infliger parfois involontairement et souvent non, juste par intérêt.
Savate a souffert, on le comprend dès le début. L'amitié qu'il ressent quasi instantanément pour Lenny surprend, amuse et, très vite, nous intrigue. D'autant qu'on entre aussitôt en empathie nous aussi avec ce petit garçon, plein de bravoure et un tantinet d'insolence envers cette vie qui le malmène ainsi depuis si, trop, longtemps.
Ce roman est pétri de bons sentiments et nous parle en même temps de la peur des autres, de l'inconnu mais aussi de confiance et d'honnêteté. A une époque où on a un peu trop tendance à oublier ces valeurs essentielles.