Le corps d'après
S'il y a une décision que j'ai bien fait de prendre (même si à la base ce fut plus une impulsion), c'est de participer à nouveau à l'aventure des 68 premières fois. Troisième lecture et encore une lecture percutante, qui me touche, me pose question et remet en cause certaines idées toutes faites que, par la force des choses ou simplement mon éducation, j'ai faites miennes.
Ce premier roman que Viriginie Noar signe pour les éditions François Bourin, Le Corps d'après, c'est celui de la vie. De la vie qui vient au monde. Comme elle peut.
L'histoire commence par la naissance, l'accouchement qui vient de se passer, l'enfant qui vient de naître et que tous s'accordent à trouver beau, magnifique, "que du bonheur". Et cette femme qui vient de donner la vie et qui, d'un coup, se retrouve seule, laissée à l'écart, face à ce corps qui a porté l'enfant, qui a vécu à son rythme pendant neuf mois, face à ce sang qui s'écoule d'elle à nouveau, face à tout ce qui s'en est échappé pendant l'enfantement et qui lui laisse un sentiment de honte, de dégoût d'elle-même. Et par voie de conséquence face à ce "bonheur" qu'elle n'éprouve pas en cet instant déterminant.
Du "tu" qu'elle employait pour se parler après la naissance, quand elle s'est retrouvée seule face à son image, la narratrice reprend le "je" et, sous la plume de Virginie Noar, revient sur la découverte de sa grossesse, l'annonce, ce corps au début fidèle à lui-même et qui au fil des jours, des semaines, des mois change, évolue, devient habité par cette nouvelle vie qui croit et sera bientôt une réalité.
Ce roman, c'est celui de la plus belle histoire qui soit. Ce qui m'a le plus impressionnée, c'est son authenticité, ce regard cru, sans fard, ni paillettes que l'auteur pose sur la maternité. Tout ce qui fait que parfois l'instinct maternel n'est pas au rendez-vous le jour J mais se manifeste à l'improviste et occupe alors toute la place, la sienne.
J'ai déjà lu des romans qui parlent de ce thème si délicat de la maternité. Françoise Guérin dans le si justement nommé "Maternité" et Sophie Adriansen dans "Linea nigra" l'ont traité avec une grande justesse et délicatesse. Ce qui m'a vraiment touché ici, c'est d'abord ce ton direct et sans fioritures qu'emploie Virginie Noar et surtout cette construction en courts chapitres, avec des réflexions, des descriptions, des rêves inavoués, des impressions tues au monde extérieur et qui hurlent à l'intérieur. Tout ce qui fait que, non, décidément, la maternité ne va pas de soi et qu'il revient à chaque femme de vivre la sienne. Mais ça, ce n'est pas encore vraiment gagné!