Roma
Quand j'ai proposé "week-end à Rome" comme thème pour ce samedi de notre semaine italienne, j'avais en tête de vous parler de ce premier roman de Mirko Zilahy dont la traduction française de Marianne Faurobert est parue au printemps dernier aux Presses de la Cité, dans la collection Sang d'encre. Et de sang, il en est fortement question ici, dans ce roman noir à souhait qui nous dévoile la Ville éternelle sous ses côtés les plus sombres.
Depuis des jours, il pleut sur Rome. Une pluie incessante qui agace, contrarie et échauffe les esprits. Une pluie égale à l'humeur sombre qu'affiche le commissaire Enrico Mancini, depuis le décès de sa femme tendrement aimée, qui n'a pas survécu à un cancer foudroyant et est morte, seule, à l'hôpital après l'avoir vivement encouragé à suivre une nouvelle formation, plus approfondie, de profileur à Quantico aux USA. Et de cela, il ne se remet pas, Mancini, et s'en voudra probablement jusqu'à la fin de sa vie.
C'est pourquoi il a fait sienne l'enquête sur la disparition soudaine et inexpliquée de l'oncologue qui a suivi son épouse, se faisant la promesse de le retrouver sain et sauf, coûte que coûte. C'est pourquoi aussi lorsqu'on lui signale la découverte du corps d'une femme sauvagement mutilé à proximité du Tibre, il ne veut pas s'en mêler. Pas plus lorsqu'un deuxième crime, tout aussi atroce, est perpétré sur un prêtre, toujours dans la même zone géographique. Et cela même si son supérieur hiérarchique voit là le fait d'un tueur en série. Mancini refuse tout net d'assurer cette enquête.
Pourtant lorsqu'un troisième crime est commis, puis un quatrième, tout aussi barbares, force est pour lui d'essayer d'arrêter cette succession, d'autant plus que la presse s'en mêle et qu'un vent de panique commence à s'emparer de la population. Bien qu'à contre-coeur, Mancini constitue une équipe sérieuse et entraînée pour l'aider dans cette enquête, se laissant quand même un peu de temps, mais trop peu cependant, pour tenter de résoudre ce qu'il appelle "son" affaire personnelle et retrouver l'oncologue de sa femme avant qu'il ne soit trop tard.
Mais tout se corse encore quand le commissaire découvre les mails reçus, un par un, par un journaliste critique littéraire retraité dans lesquels celui qui signe "la Voix" révèle qu'il y aura cinq meurtres, comme les cinq branches de cette étoile dans le ciel qui le guide désormais. Mais qui se cache derrière ce nom? Et pourquoi? Qu'a-t-il bien pu se passer dans sa vie pour qu'il en soit venu à commettre ces crimes abjects? Et si un lien, ténu certes mais de plus en plus réel, se créait entre ces meurtres et l'enquête personnelle du commissaire?...
Mon avis sur ce roman est assez partagé. D'une part j'ai apprécié de faire la connaissance de ce commissaire, de découvrir Rome sous des aspects loin des clichés touristiques habituels, d'en connaitre les bas-fonds, d'en subir les intempéries. Cette pluie qui n'arrête finit fatalement par nous taper sur les nerfs à nous aussi, lecteurs! Et d'autre part, j'ai trouvé que tout était dans le "trop" dans ce roman. La dépression qui accable Mancini, l'amour discret que lui porte la procureur qui finit peu à peu par montrer ses faiblesses et ses failles mais sans espoir d'être aimée ou même seulement appréciée en retour, le traumatisme d'enfance de l'inspectrice Caterina que cette enquête fait remonter à la surface, l'oncologue en plein divorce qui n'a peut-être pas apporté tous les soins qu'il aurait fallu à ses patientes, et les autres, le divisionnaire, les coéquipiers de Mancini, tous ou presque ont un fardeau sur les épaules qu'ils trimballent et qui leur sautent en pleine figure au moment le plus inopportun.
Pour moi, tous ces états d'âmes accumulés, évoqués tour à tour, en continu ou en chassés-croisés nuisent un peu à l'ensemble du roman. C'est tellement trop qu'à la fin on en arrive presque à trouver normales les motivations du tueur. Un comble quand même! Et c'est d'autant plus dommage, à mes yeux, que l'histoire est bien ficelée, le suspense bien mené et l'écriture d'une fluidité des plus agréable.
Alors ce "Roma", pas vraiment une déception mais pas vraiment un coup de coeur non plus.
Je compte cette lecture pour la semaine italienne et pour le challenge Thrillers et polars de Sharon.