Mémoires Fauves
Alors qu'il vient d'être sélectionné pour le Prix Interallié, j'ai envie de vous parler aujourd'hui du dernier roman de René Guitton que j'ai eu le plaisir de lire cet été.
René Guitton, j'ai eu la chance de le rencontrer au printemps 2013 grâce à son attachée de presse Marie Voisin peu avant la sortie du roman dédié à son père "L'Entre-temps", paru chez Calmann-Lévy tout comme ce "Mémoires Fauves". Et je garde un très beau souvenir de cette rencontre, de cet entretien avec un homme sincère, profondément humain et humaniste. Un homme de qualité, un écrivain sensible et franc, authentique.
Cette belle écriture, cet humanisme, je les ai retrouvés avec bonheur dans ce nouveau roman et c'est d'autant plus difficile pour moi d'en parler que je sais que tout ce que je pourrai en dire sera toujours en dessous de ce que cette lecture m'a apporté.
Fauves, c'est Benjamin Tawal, artiste engagé né à Alexandrie mais ayant longtemps vécu à Beyrouth, imprégné dans l'univers particulier du show-business, arrogant, odieux parfois, souvent, irritant et même tellement suffisant qu'il en devient insupportable. Bien sûr la gloire, son succès ne sont pas étrangers à ce comportement à la limite méprisant. Mais cela n'explique pas tout. Sa rencontre avec Michel Beaufort, grand patron de la major compagny Philips, Franco-Libanais issu d'une longue dynastie de Croisés, et donc d'origine orientale comme lui, cette rencontre va ouvrir une nouvelle page dans la vie de Fauves. Une amitié surprenante va s'imposer entre les deux hommes. Une amitié que ni l'un ni l'autre ne souhaite vraiment pourtant, tellement elle leur parait inconcevable au vu de leurs deux personnalités, diamétralement opposées. C'est là qu'intervient Aurélie Mombron, journaliste spécialisée dans les conflits du Moyen-Orient et qui a fait sienne la lutte contre l'extrême droite européenne. A ses risques et périls. Une relation d'amour s'installe entre la jeune femme et la star, Fauves. Une relation qui fait les gros titres de la presse people jusqu'au moment fatal : la mort tragique de Fauves. Mort volontaire? Meurtre? Accident? Crime?
La lecture de son journal de bord va nous apporter bien des explications, bien des surprises aussi sur la relation singulière qui s'est instaurée entre les trois protagonistes. Sur ce qui est vrai, ce qu'on a voulu nous faire passer pour vrai, ce qui aurait dû être, ce qui aurait pu être et ce qui a été.
Un livre magnifique que ce "Mémoires Fauves", puissant, fort, puissamment fort. Difficile de dire tout ce que les mots de René Guitton contiennent et nous apportent si ce n'est que cette histoire m'a parue très proche, comme si je la connaissais déjà sans rien en savoir. Sans doute est-ce là un des effets de son humanité. Les trois personnages, avec leur vécu, leurs expériences, leurs tourments, leurs démons, restent profondément humains avec leurs forces et avec leurs faiblesses. Le récit en devient parfois terriblement émouvant.
Et même si on se doute, certaines insinuations de l'auteur, certaines tournures de phrases et même certains non-dits, nous laissent supposer et découvrir ce qui fut réellement l'histoire de ce trio, impliqué malgré lui (et comme nous tous) dans l'Histoire du monde, on ne peut qu'applaudir la maîtrise du rythme et du sens voulu par René Guitton. De la belle oeuvre!