Fils du feu

Publié le par Martine

Fils du feu

Fils du feu, de Guy Boley, paru chez Grasset, est le deuxième des 68 premiers romans dont je vous parlais ce matin et que j'ai lu hier soir.

Court (156 pages), j'ai d'abord apprécié sa belle couverture, lumineuse, étincelante. Puis, et surtout, sa belle écriture, forte et puissante, riche et extrêmement travaillée, où chaque mot trouve son écho, sa résonance, pour en renforcer son sens et son utilité à ce moment précis où il est employé.

Fils du feu, c'est encore un roman sur la mort, mais, cette fois-ci, la mort d'un fils, la mort d'un frère. C'est aussi un jeu habile sur le sens du mot "fils" qui s'écrit à l'identique au singulier, comme au pluriel. Qui est donc ce fils du feu, ou qui sont donc ces fils du feu? Pour le comprendre, il faut écouter ce que nous dit, écrit, l'auteur Guy Boley.

Il y a le père, forgeron. Il y a ses fils, deux enfants appelés à le devenir, forgeron. Il y a la mère. Et puis il y a le drame, cet enfant, 5 ans à peine, ce fils qui meurt. Il n'y a plus qu'un fils, qui, devenu adulte, avec du recul mais une souffrance toujours là, présente, tente de comprendre, d'expliquer, montrer pourquoi il est parti, pourquoi il n'est pas devenu forgeron mais peintre, un peintre qui peint la paix, l'apaisement, la sérénité. Celle qu'il a enfin trouvée?...

Ce roman, c'est aussi celui du feu, vivant, ce feu qui bouge, qui éclaire, qui brûle, dont il faut se méfier mais qui, en même temps, chauffe, réchauffe. Ce feu que le père parvient à dompter, frappe avec son enclume, avec lequel il semble jouer, avec lequel il fait corps. A son corps défendant, et même encore quand il tente désespérément de faire disparaître son propre corps, qu'il le maltraite, qu'il l'abîme, comme pour le purger de ce poids trop lourd qui l'habite tout entier depuis la perte de son fils. Tout comme il traite, maltraite le corps de sa femme, cette mère qui se refuse à vivre sans son enfant, qui, bien sûr, a rempli son rôle de mère éplorée, endeuillée, à merveille mais qui, une fois l'attention portée au drame disparue, fait comme si rien n'était arrivé, comme si son fils était toujours présent, comme si, aux yeux de l'enfant qui reste, elle avait besoin de jouer à faire semblant pour vivre près de lui. Comment, dans de telles conditions, ce fils qui reste, qui assiste à ces autodestructions parentales, peut-il se construire, bâtir son identité, forger sa personnalité? A quel prix? Celui de la fuite? Du refus? De l'oubli?

Un texte lumineux, puissant et réaliste, que j'ai lu d'une traite, buttant parfois sur certains passages un peu trop forts, trop bruts (notamment dans les scènes où le père prend toute la place) et m'efforçant de comprendre cette mère sur qui j'ai été tentée de m'apitoyer alors qu'en fait ce n'est pas ce qu'elle veut, ni ce que veut son fils.

Un très beau texte encore pour ce sujet ô combien difficile et encore une fois admirablement traité.

Fils du feu
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L
Lumineux, c'est exactement ça, malgré son sujet grave.
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M
Merci Laure. J'ai pensé à "ardent" également...
P
Il n'y a rien à ajouter...<br /> Gros bisous, chère Martine.
Répondre
M
Peut-être... Peut-être pas...<br /> Merci ma chère Denise. Gros bisous et belle journée!