Tu m'envoies un mail?

Publié le par Martine

Tu m'envoies un mail?

Cela fait bien longtemps que j'avais envie de lire ce livre paru aux éditions Privé en 2010. Depuis que j'ai eu le plaisir de découvrir et d'apprécier l'écriture d'Emmanuelle Friedmann en fait. Aussi, lorsque j'ai vu cet ouvrage en prêt à la bibliothèque de Saint-Marcel-les-Valence, je n'ai pas hésité une seconde et l'ai de suite emprunté. Puis dévoré. Avant de me mettre à pleurer.

Car ce livre (j'ai du mal à l'appeler "roman" même s'il a la volonté de n'être qu'une fiction), je l'ai vécu, hélas. Et je redoute de le revivre encore...

Nouvellement recrutée dans le service "Communication" de l'Entreprise, une jeune femme, journaliste pigiste free lance par ailleurs (et expérimentant donc la précarité au quotidien) se réjouit de la stabilité que lui apporte cet emploi salarié et de devenir ainsi "comme tout le monde", avec la perspective de pouvoir bientôt s'offrir le logement de ses rêves à Paris. Mais cette euphorie est de très courte durée. 

En effet, très vite, elle est mise dans le bain de l'Entreprise. Là, quand ton chef de service a une mission à te confier, il t'envoie un mail. Quand tu as une demande particulière à lui faire, tu lui envoies un mail. En fait, aussi étonnant que cela puisse paraître, toute communication a quelque niveau qu'elle soit, passe par l'envoi d'un mail. Pour garder une trace écrite que la demande a bien été faite et, paradoxalement, se "couvrir" vis à vis des autres employés et de ses supérieurs si ce qui a été demandé n'a pas, ou mal, ou pas comme on l'aurait voulu, été exécuté.

Quand, en plus, il s'avère que sa supérieure directe, la dircom, la considère comme "sa" chose, ne supportant pas que la jeune employée puisse répondre à des demandes extérieures, pourtant inévitables dans ce service, et, plus que tout, puisse répondre aux demandes du directeur adjoint (beau et fat), la tension monte inexorablement. Le harcèlement moral se fait jour, peu à peu, prend toute la place. C'est l'escalade. Les menaces de licenciement pleuvent. A tel point que la jeune femme en vient à souhaiter ardemment cette délivrance, regrettant vraiment même sa précarité précédente.

J'ai lu ce premier "roman" d'Emmanuelle Friedmann d'une traite, ne pouvant pas le lâcher, retrouvant, revivant, ici et là, des situations que je pensais avoir oubliées, tellement ce récit est troublant d'authenticité, de réalité, de vérité. En courts chapitres de deux trois pages, Emmanuelle Friedmann aborde toutes les situations professionnelles se produisant ou susceptibles de se produire dans un tel service. Les caractères des différents protagonistes sont esquissés, analysés au plus juste, avec une finesse psychologique remarquable. Les propos résonnent comme les sombres échos d'un tambour, en rythme, répétitifs et lancinants. Les mécanismes du harcèlement moral sont décryptés et démontés sans état d'âme, avec une clairvoyance d'autant plus effrayante qu'il est connu, identifié, reconnu par la victime en personne.

Ce livre a de forts accents de vécu, je vous l'ai dit. Et je ne suis certainement pas la seule à le penser puisque, à la bibliothèque, il est classé parmi les histoires vraies. 

En tous les cas, pour moi, il est et demeure excellent.

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B
Je veux le lire aussi, je vais le commander chez Passerelles "ma" librairie adorée, Que d'émotions en lisant ta chronique Martine. Début de ma carrière... 1972 -machine à écrire mécanique- communication verbale...! Que de changements en fin de carrière !!! J'ai connu en effet les mails !!! Les mails pour garder des traces... Dingue !!! Que tout à changé... Quelle évolution... Mais pas toujours dans le bon sens !!!<br /> ... J'aurais également beaucoup à développer à ce sujet...<br /> Douce soirée Martine et très belle semaine.<br /> Je t'embrasse très fort.<br /> Bernadette.
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M
Il y a en effet beaucoup à dire sur le sujet et Emmanuelle Friedmann le fait très très bien. Alors, évidemment, ça remue! Merci beaucoup, chère Bernadette! Je t'embrasse très très fort
E
Je voulais le lire lors de sa sortie et je ne suis jamais tombée dessus en médiathèque, je l'avais oublié mais à la lecture de ton article, il faut que je me le procure.
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M
Très bonne idée! Je te souhaite de le trouver! Merci Emma